samedi 26 janvier 2008

Le chant (poème de NAKANO Shigéharu)

Ne chante pas.

Ne chante ni des fleurs de renouée ni des ailes de libellules.

Ne chante ni du murmure de vent ni de l'odeur des cheveux de femme.

Repousse toutes les fragilités,

Toutes les irréalités,

Et toutes les langueurs.

Chasse tous les raffinements.

Chante seulement tes vrais sentiments,

Ce qui parle à ta faim,

Les pointes qui remontent à ta gorge.

Le chant qui rebondit quand tu es frappé,

Le chant qui puise le courage du fond de ta honte,

Tu chanteras ces chants en vers sévères,

Avec ta corde vocale vibrante.

Enfonce ces chants

Dans la poitrine des gens qui passent.


Poème de NAKANO Shigéharu (1902-1979), écrit en 1926, traduit par moi.


Nakano est un écrivain japonais, qui représente la "littérature prolétarienne". Il fut sénateur du Parti Socialiste après la Deuxième Guerre mondiale. Ce mouvement littéraire très important d'avant-guerre est injustement méconnu des traducteurs français. Est-ce parce que les Français attirés par la culture japonaise sont souvent bourges? "La sensibilité endurcie" de Nakagiri rime avec ce poème, souvent étudié au lycée.



Les fleurs de renouée sont appelées "riz rouge" dans ce poème. On fait le riz rouge, violet en réalité, pour les festivités et certaines occasions comme les premières règles de filles. Les enfants jouent à la dinette avec ces petites fleurs qui font penser à ce plat.

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