Depuis que le prince Shotoku a adopté le bouddhisme comme la religion d'Etat, le Japon a connu une floresence de la culture bouddhiste surtout à Nara. Le premier chef religieux à qui on peut attribuer le titre d'empereur est Monmu (règne 696-707). Nara fut la capitale pendant le huitième siècle, avant de transférer à Kyoto. Et Murakami (r.946-967) était le dernier chef religieux qui ait eu le titre de l'empereur (tenno) après sa mort pendant 900 ans. Les chefs religieux suivants n'avaient qu'un titre bouddhiste comme les autres en tant que personnes décédées.
Celui qui s'est fait donner cette appellation archaïque au dix-neuvième s'appelle Kokaku (r.1779-1817, mort en 1840). Il a succédé à Gomomozono, mort à l'âge de 22 ans. La famille de chef religieux n'avait plus d'enfants mâles, et la mère de Gomomozono, Gosakuramachi est la dernière femme dotée de pouvoir religieux en date.
Cependant, Araï Hakuseki (1657-1725), savant et politique, avait fondé une branche de famille impériale pour prévenir cette situation. Kokaku est un arrière-petit-fils du chef religieux Higashiyama (r.1687-1709). Kokaku a voulu fortifier le statut de sa famille, et il a fait ressusciter beaucoup de "traditions" disparues au haut moyen âge. Et il a choisi le shintoïsme comme sa première religion.
Il faut comprendre le contexte historique. Le dix-huitième siècle a connu un renouveau nationaliste, et il y avait des érudits comme Kamo-no Mabuchi (1697-1769) et Motoori Norinaga (1730-1801), qui avaient découvert la mythologie japonaise avant la rencontre avec la civilisation chinoise. Même si le Japon avait fermé ses frontières depuis le début du 17e siècle pour se mettre à l'abri de la christianisation par les Européens, les Japonais admiraient la Chine sans conditions comme le modèle de la culture, et ils ne croyaient pas qu'il y avait eu des corpus de leurs propres mythes avant la rencontre avec le continent. Mais ces savants "nationalistes" ont voulu démontrer que les Japonais avaient bien leur propre culture. Ces hommes de lettres "nationalistes" ont fait quelque chose qui me feraient penser à la fois à Martin Luther et à Nietzsche, et j'ai bien du respect pour eux.
Mais c'est Kokaku, issu d'une nouvelle branche de la famille de chef religieux, qui a pleinement profité de cette redécouverte par les érudits. Ses ancêtres s'étaient contentés de se donner le titre de bouddhiste après leur mort comme tous les communs pendant 900 ans, mais il a voulu récupérer le titre éminent de l'empereur (tenno). Il existe des senryu (petits poèmes satiriques ayant la même forme que le haïku) de l'époque qui s'étonnent de la réapparition inattendue de cette appellation désuète.
Auparavant, le shintoïsme était une croyance populaire accessoire du bouddhisme, mais Kokaku a renversé l'ordre. Désormais, c'est cet animisme qui est la première religion d'Etat. Kokaku a pu le faire grâce aux études méticuleuses des savants nationalistes (des "humanistes" au Japon?). Le shogunat de Tokugawa qui gardait le pouvoir depuis le début du 17e siècle s'affaiblissait à cause de famines répétées et de demandes des Occidentaux. pour une ouverture des frontières. Et le peuple déçu par le shogunat en appelait de plus en plus au nouvel empereur qui a choisi le shintoïsme. Il ne faut pas oublier que la religion de ces guerriers était le bouddhisme du courant zen.
C'est à l'occasion de sa mort en 1840 que Kokaku a eu le titre de l'empereur. Et l'an 1854 connaît l'ouverture des frontières. La "restitution" du pouvoir politique au chef religieux, désormais appelé l'empereur (tenno) sans surprendre personne, a été faite en 1867, après presque 700 ans de règne de samouraïs. L'empereur Meiji, qui s'est fait déclarer chef d'Etat, est l'arrière-petit-fils de Kokaku. C'est pour préparer son règne qu'on a fait clairement séparer le bouddhisme et le shintoïsme. (Les religieux shintoïstes vivaient souvent aux temples bouddhistes jusqu'en 1867.) Mais son règne était plutôt tempéré. C'est sous le règne de Showa, connu sous le nom de Hirohito, qu'est arrivée la folie.
Akihito, l'empereur actuel, est le septième empereur de la dynastie au plus, qui n'est nullement la plus ancienne du monde, mais une des plus récentes. Plus sérieusement, il n'est que le quatrième empereur depuis la "restitution".
Vous ne devez pas reprocher aux Japonais que vous connaissez s'ils n'ont jamais entendu parler de Kokaku. C'est ce qu'on apprend jamais aux écoles...
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もしもし Mosi mosi (moshi moshi) Allô
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Un collègue algérien m'a raconté cette histoire.
Un Algérien a été nouvellement embauché par notre bureau japonais. Il avait
souvent entendu les Japonais d...
Il y a 15 ans
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